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Dans l’attente que quelque chose se passe - 2018

 

Dans les métamorphoses d’Ovide, Jupiter et Mercure descendent sur terre et demandent l’hospitalité aux habitants d’un village, « ils frappèrent à mille portes, cherchant un endroit où se reposer : mille portes verrouillées se fermèrent. Une seule maison les accueillit, petite, à la vérité, au toit couvert de chaume et de roseaux des marais.
Là habitaient une vieille femme pieuse, Baucis, ainsi que Philémon, du même âge qu’elle. » 1.

Le vieux couple installe les deux hommes autour d’une table et leur offre un repas frugal. Lorsque ces derniers découvrent l’identité des deux étrangers, ils s’excusent de les avoir accueilli avec si peu d’apprêt et tentent d’attraper leur oie, en vain.

Cette scène souvent représentée en peinture a été le point de départ de mon travail. En m’inspirant largement de la toile peinte par Jean-Bernard Restout, Philémon et Baucis donnant l’hospitalité à Jupiter et Mercure, j’ai choisi d’en construire le décor : la table, les chaises et quelques éléments significatifs de l’histoire. Cette scène est vidée de ses protagonistes.

D’autres photographies montrent des fragments de la scène, Baucis et Philémon apparaissent par endroits alors que Mercure et Jupiter ne sont pas représentés.

La confrontation de l’image de la pièce vide et des détails fait apparaître deux temporalités différentes. Comme si l’une était au présent et à investir et que les fragments constituaient une mémoire fragile et morcelée appartenant au passé. La présentation des photographies en ligne avec très peu d’espace entre chacune, évoque une pellicule photographique, les différentes valeurs de plans donnent un sentiment de mouvement, celui du photographe quadrillant un espace avec son appareil, mais aussi le mouvement de la scène elle-même, habitée par les trois protagonistes.

En regard, la photographie de la pièce vide semble calme et silencieuse, dans l’attente que quelque chose s’y passe.

1. OVIDE, MÉTAMORPHOSES, LIVRE VIII, Récits chez Achéloüs (I) : Les Échinades, Philémon et Baucis (8, 547-724). Traduction de A.-M. Boxus et J. Poucet, Bruxelles, 2007.

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